Nylhin, Faucheur d'Ombre

"Bonsoir Samuel"
La voix semblait amicale, mais il irradiait d'elle comme une aura d'autorité que l'arrivant n'avait jamais ressentie auparavant.
-Bonsoir.
-Je dois dire que tu m’as agréablement surpris, Samuel, jamais aucun humain n'avait réussi ce que tu as réalisé.
-Ce ne fut en aucun cas facile, et si aujourd'hui j'ai atteins mon but, c'est seulement parce que vous l'avez bien voulu.
-Tu es malin. Mais assied toi je t'en prie.
Samuel regarda autour de lui, quelque peu désorienté: Il n'y avait dans cet entrepôt sombre aucun siège ou autre fauteuil. Et la voix qui se répercutait sur les parois métalliques créait un écho qui rendait impossible la détection de sa source. Alors qu'il se perdait dans ces pensées, une lumière venant du plafond éclaira soudain le centre de l'entrepôt, révélant une chaise banale, comme on en voit dans n'importe quel lieu public. Samuel s'y assit, puis la voix repris:
"Retrace ton chemin, Samuel, même si je le connais, j'aimerais que tu m'en parle.
-Oui, d'accord. Mais par où commencer...
-Par le début.
-Très bien. Par le début... En fait, il est difficile de définir un début à mon chemin, mais je vais tout de même essayer.
Le commencement, c'est en moi qu'il se trouve, c'est l'ennui que j'ai commencé à ressentir il y a 2 ans, cette haine de la vie humaine quotidienne qui empeste la banalité et l'inintérêt. Ce sentiment était la mèche, et l'étincelle qui l'a embrasé, c'est vous qui l'avez créée. Toute ma vie je me suis passionné pour l'inhabituel, pour ce que les hommes ne peuvent expliquer et qui, donc, leur fait peur. Je me suis en fait beaucoup penché sur les mythes qui entourent votre race... Mais je désespérais, car dans mon ignorance bornée, j’étais persuadé que les enfants de Caïn n'étaient qu'une fable parmi d'autres.
Mais à un moment, par hasard ou grâce au destin, je suis tombé sur votre étincelle.
Un article, un simple petit article dans un journal banal a éveillé ma curiosité. Il parlait de la découverte d'un cadavre, retrouvé dans une rue peu fréquentée avec un pieu dans le coeur. Jusque là rien d'étrange. Ce qui l'est plus, c'est que l'autopsie révéla que la personne, dont la mort clinique remontait à quelques heures, n'avait pratiquement plus de sang dans les veines, et qu'il semblait aussi que son coeur était mort depuis environ 20 années. En fait cet article soulignait exagérément l'incompétence du personnel en charge de l'autopsie, mais cela n'étouffa pas la vague d'espoir et d'excitation qui était née en moi.
En tant qu'étudiant, il me fut difficile de réussir à voir le corps, mais j'y suis finalement parvenu, et ce que j'ai découvert m'a emplit de joie. Deux petits points blanchis par le temps se trouvaient au cou du mort.
Je n'ai pas eu le temps de faire de plus amples observations, mais ce que j'avais découvert me suffisait. Je me suis alors mis à faire des recherches, beaucoup de recherches, pour réussir à trouver les enfants de Caïn.
Plusieurs jours après ma visite à la morgue, un article court parlait de la disparition d'un macchabée.
Ne trouvant rien de précis dans les livres, je me suis mis à la poursuite de ce corps. Réunissant indices et pistes (bien trop facilement), je suis parvenu à retrouver sa piste.
Votre piste.
Vous pouvez vous montrer, je vous ai déjà vu."
"Je préfère l'ombre à la lumière, tu le sais"
La voix féminine s'était rapprochée, et ponctuait des bruits de pas se dirigeants vers Samuel. La vampire se révéla à la lumière blafarde de la lampe. C'était une vampire à la peau de neige d'une douloureuse beauté, ses cheveux étaient rouges sang et longs, et ses yeux d'un bleu clair d'une insondable profondeur.
Samuel, envoûté par la beauté naturelle de cette enfant de Caïn, n'esquissa pas un geste, ne prononça pas une parole.
« Maintenant que tu m’as trouvée, que vas-tu faire, petit humain ? »
Sortant de sa léthargie contemplative, il répondit :
«Je… Vous savez ce que je veux… »
La femme sourit, une lueur étrange dansant dans ses yeux.
« Pourquoi le veux-tu ? »
Samuel se leva de la chaise, et fit face au vampire. Il répondit d’un ton déterminé :
« Pour être Libre. »
« Tu sera libre, sous le nom de Nylhin. Samuel meurt ce soir. Viens dans mes bras, mon enfant » Elle ouvrit ses bras et Samuel l’étreignit. L’enfant de Caïn souffla à l’oreille de Samuel d’une voix douce : « Je suis Alecto, Assamite, et ce soir je t’offre l’étreinte. »
Le froid s’insuffla en Samuel, et le plaisir l’envahit, tel un ouragan écarlate.
Nylhin naquit.